Métro porte Dauphine. Deux filles marchent vers le Pavillon royal de Boulogne où démarre la course.

— Tu connais le parcours ?

— Non. Mais t’inquiète, j’ai regardé, ça ira. 

— OK, mais comme il fait trop froid !

C’est vrai qu’il fait froid. Normal, il n’est que 8h30. Je ne peux pas me plaindre : je suis en manteau, elles, en jogging. Je viens assister à la troisième édition parisienne d’Urgent Run Paris, une course à pied solidaire où 100 % des recettes financeront des programmes de sanitarisation dans le monde. Dans deux jours, c’est la journée mondiale des toilettes. 60% de l’humanité n’a pas accès à des sanitaires. Un droit pourtant fondamental. La course s’inscrit dans ce cadre. 

Urgent Run

The Urgent Run Paris Race

Quant à moi, je me rends à cette course pour assister à la première utilisation publique des urinoires madamePee : des urinoires pour femmes. Les hommes ont toujours des pissotières. Mais, rien n’est prévu pour que les femmes puissent uriner dans un endroit protégé et propre. 

Les coureuses d’aujourd’hui ne le savent pas encore, mais pour la première fois, elles pourront. Les urinoires madame Pee permettent aux femmes d’uriner quand elles n’ont besoin que d’uriner. Je trouve ça génial mais je suis vaguement inquiet pour Nathalie, la femme qui a fondé et dirige madamePee. Comment les filles vont réagir ? Cette commodité n’existait pas avant. Vont-elles adhérer ?

Arrivée au Pavillon royal. Plein de joggers papotent, sautillent et se déplacent en soufflant de la vapeur de froid. Certains boivent un café, d’autres croquent un morceau de banane distribué par les bénévoles. Un animateur met l’ambiance entre deux morceaux de musique. Ambiance course, bon enfant. 

Je cherche un teeshirt de la team madamePee et j’aperçois vite David, en charge des Opérations, sur la droite. On part ensemble vers les cabines qui sont toutes placées sur une allée à droite. Et là, je vois Nathalie toute détendue ce jour J. Elle discute avec Magali, universitaire et chercheuse, en charge de récolter les impressions des filles après l’utilisation. 

Ne les retiens pas trop longtemps, elles ont le départ de la course bientôt. 

Ne t’inquiète pas, j’ai l’habitude de ce genre de contexte. »

30 minutes avant le départ. 30 minutes où tout se joue. Les coureurs et les coureuses font leur arrêt pipi avant de s’élancer. Comme un suricate aux aguets, je me dresse sur un parpaing et regarde ce qui se passe dans la file d’attente vers les toilettes. A ma gauche, les urinoirs masculins en format tipi à six places. Au centre, quatre cabines classiques fermées mixtes. A droite, les trois cabines urinoires madamePee.

Urinoir madamePee à Urgent Run

Toilettes urinoires pour femmes madamePee

Je remarque que dans la file d’attente les hommes cherchent naturellement leurs urinoirs alors que les femmes paraissent déjà résignées à attendre. Il faut dire que mettre toutes les toilettes en bout d’allée n‘aide pas. Les coureuses ne sont pas au courant qu’il y a des urinoires pour elles.

Nathalie réagit et leur dit : « Hé les filles ! Si c’est juste pour faire pipi, il y a des toilettes spécialement pour vous par là. »  Et elle repositionne le kakemono avec la mention « Juste pour faire pipi ». 

Depuis, c’est fluide. Après leur passage, les filles n’ont même pas l’air surprise. Serait-ce naturel  de « juste faire pipi » ? Les filles qui sortent avertissent celles qui arrivent qu’il y a des urinoires pour éviter d’attendre. Résultat, ça enchaîne. Tellement que ça va presque plus vite que les hommes. Bon, ce n’est pas une course, hein !

Comme le confieront les filles dans leurs feedbacks, madamePee c’est « hyper bien », propre et rapide. Les chronos leur donnent raison : on gagne 20 à 50 secondes en moyenne par rapport aux cabines fermées. L’objectif premier de ces urinoires était de diminuer le temps d’attente. Pour madamePee, c’est gagné !

La course a démarré. Nathalie nettoie l’intérieur de ses cabines avec un spray au vinaigre blanc. Rien n’est souillé. David récupère les jerricanes d’urine pour les charger puis m’emmène prendre un café car il est inquiet : j’ai les mains violettes de froid. Une heure plus tard, les premiers coureurs arrivent. La première fille est acclamée et reçoit un teeshirt madamePee des mains de la fondatrice. L’animateur scande un hommage à madamePee. On est ravis.

Participants Urgent Run

Quant à moi, qui suis maintenant chargé de la communication de madamePee, je suis très content d’avoir assisté à un aussi beau départ et enthousiaste pour la suite ! 


Alexandre

responsable communication chez madamePee

Nathalie et Alexandre à Urgent Run

Alexandre et Nathalie – UrgentRun – Paris – 17/11/18