À Amsterdam, ces femmes ont travaillé pendant 9 ans pour que la ville s’équipe en sanitaires publics, après avoir écopé d’une amende pour avoir uriné dans la rue alors que la ville d’Amsterdam ne compte que 3 toilettes publiques.

Voie publique cherche toilette

Qui aurait cru que faire pipi, un besoin vital et naturel, pouvait être sanctionné par la loi ?

Ou plutôt, comment faire quand uriner dans la rue est interdit mais qu’aucune solution n’est proposée en contrepartie ?

Allons même plus loin, comment faire quand :

  • uriner sur la voie publique est interdit,
  • qu’une solution est proposée pour 50% seulement de la population,
  • qu’aucune toilette publique n’est en vue,
  • que les bars sont fermés,
  • et que l’on est une femme.

Ça peut sembler être beaucoup de paramètres, mais ils sont rassemblés plus souvent qu’il n’y paraît. Et la réponse est : on fait comme on peut.

Dans le cas de ces néerlandaises qui ont dû se résoudre à un pipi rapide dans la rue, le résultat de cettte conjoncture se manifeste sous la forme d’amende. Une situation révoltante, qui après des années de combat a abouti au déblocage d’un budget de 4 millions d’euros par la ville d’Amsterdam pour l’installation de toilettes publiques, et qui est relatée dans cet article de The Guardian.

Qu’est-ce qu’il ne faut pas faire pour avoir plus de toilettes !

L’article relate comment Geerte Piening s’est retrouvée prise par une envie pressante un soir en rentrant chez elle. À cette heure-là, plus de bars ouverts, les toilettes publiques les plus proches l’obligeant à effectuer un détour de 2km, elle décide, cachée par une amie, de se soulager dans une allée peu fréquentée. Repérée par des agents de police, elle écope d’une amende pour avoir uriné sur la voie publique.

Indignée, elle se rend compte que la situation est tout sauf juste. Interdire les pipis sauvages c’est compréhensible, à condition d’offrir la possibilité de se soulager dignement, et en toute égalité !

La ville d’Amsterdam est équipée de 35 urinoirs masculins, pour seulement 3 toilettes « mixtes ». Un nombre de sanitaires faible qui entraîne forcément des mauvais comportements, mais surtout un déséquilibre qui pénalise 50% de la population. Une inégalité qui ne touche pas que les femmes puisque les urinoirs masculins ne sont pas utilisables par certaines personnes en situation de handicap, ni par les enfants ou certaines personnes âgées. Quitte à proposer des sanitaires, autant faire en sorte qu’il y en a pour tout le monde !

Le tabou des villes par les hommes, pour les hommes

Quand on regarde la répartition des sanitaires à l’échelle mondiale, la dominance de l’urinoir masculin saute aux yeux. Dans les espaces publics, une explication simple, la construction systématique des territoires urbains par les hommes pour les hommes, à une époque où les femmes étaient encouragées à rester à la maison.

Bien des décennies plus tard, alors que les femmes sont présentes dans tous les espaces publics, les aménagements n’ont pas évolué. La ville d’Amsterdam n’y fait pas exception.

Pire, quand le sujet de l’égalité sanitaire est porté, il fait sourire au mieux, est balayé de manière inconsidérée au pire. Dans l’article de The Guardian, c’est ce que l’on lit avec désappointement.

Porté au tribunal, l’appel de Geerte Piening trouve une réponse simple auprès du juge qui traite son affaire. Non il n’y a pas d’injustice, et de toute façon, les urinoirs masculins peuvent être utilisés par les femmes, « ce n’est pas plaisant, mais c’est possible ».

Une phrase qui a déclenché une vague de réactions aux Pays-Bas, où beaucoup de femmes ont tenté l’impossible, faire pipi dans un urinoir masculin. Une gymnastique inconfortable voire carrément impossible, sans parler des enjeux d’intimité qui se posent dans l’espace public.

En bref, une réponse complètement déconnectée des réalités vécues par les femmes. Saisi par une conseillère municipale de la ville d’Amsterdam, Ilana Rooderkerk, le sujet prend de l’ampleur. Des cabines plastiques sont installées dans les endroits animés de la ville. Et puis, après des années, un investissement pour plus de sanitaires accommodant tout le monde est débloqué par la ville.

Que nous dit cette histoire ?

Cet exemple met parfaitement en lumière le statu quo existant autour des toilettes. Pour Geerte Piening, il s’illustre par sa résignation à faire autrement, ici à se soulager dans la rue, en l’absence d’équipement.

Faire autrement, c’est la solution majoritairement acceptée, et qui maintient le statu quo à sa bonne place. La plupart des gens restent dans ce cadre et en sortent rarement, ou éventuellement pour se plaindre rapidement.

Qui ne s’est jamais plaint de la file d’attente aux toilettes, mais qui a réellement pris une action concrète ? 

Dans le cas de Geerte Piening, la situation vécue combinée à l’injustice perçue, l’amende reçue, la fait sortir du statu quo, et lui permet de débuter sa longue croisade pour des sanitaires publics dans la ville d’Amsterdam.

Ce qui est dommage c’est de devoir arriver à de tels extrêmes quand l’inégalité est pourtant flagrante. Rappelons, 35 urinoirs masculins pour seulement 3 toilettes publiques, 9 ans de batailles pour débloquer un investissement sur les sanitaires. Pourquoi est-ce si compliqué d’offrir l’égalité dans les toilettes ?

Le manque de toilettes en villes

Le déséquilibre flagrant de l’offre sanitaire à Amsterdam n’est pas le seul problème, le nombre de toilettes publiques reste insuffisant. Au Pays-Bas, on dénombre environ 1 toilette pour 13 500 habitants, ce qui place le pays parmi les pays d’Europe les moins bien équipés en toilettes. Un bon ratio serait plutôt d’atteindre 1 toilette pour 4 000 habitants, plus courant du côté des pays scandinaves.

L’accès à des toilettes publiques, sécurisées, hygiéniques, en plus d’être un sujet de dignité humaine, résout un autre fléau bien présent dans les villes. Les pipis sauvages. Le sujet des urines sur la voie publique est un réel problème d’urbanisme, un sujet de mécontentement pour les riverains, d’inconfort pour les passants, et d’image pour les collectivités.

Dans les lieux à fort trafic, la nuisance est aggravée par les chaleurs de la saison estivale, qui font remonter certains effluves déplaisants. Mais en toute saison, les traces sur les trottoirs ne laissent aucun doute sur la nature de la substance.

La crainte de voir une ville se transformer en « urinoir géant » comme en fait l’état 20 minutes dans un article sur Paris et la compétition que la ville s’apprête à accueillir cet été, montre que quelle que soit la raison de ces mauvais comportements, foule, réveillon, fêtes ou lendemain de week end, la cause est toujours la même, quand il y a mauvais comportements c’est souvent dû à un manque de toilettes publiques.

Quelles solutions ?

Selon une étude que nous avons réalisée en 2021, 1 personne sur 3 signale vouloir plus de sanitaires publics en villes. Les collectivités s’équipent de plus en plus mais l’offre reste inégalitaire. Elle ne prend pas assez en compte les femmes, qui se voient rarement offrir des urinoires. Pourtant, la plupart des wc publics, notamment à Paris, proposent désormais un urinoir masculin. Pourquoi pas un équivalent féminin ?

Imaginer une zone toilettes qui soit accessible, hygiénique et sécurisante, et qui inclut une urinoire féminine au même titre que les urinoirs masculins. C’est dans cette démarche que nous avons créé les urinoir•es urbanPee qui permettent de soulager les points de tension en sanitaires.

Nos urinoires et urinoirs urbains sont sans eau et ne nécessitent donc d’aucun raccordement spécifique, permettant de les déployer rapidement dans les zones à forte affluence.

Des initiatives se structurent, comme ICI TOILETTES qui localise via une application les sanitaires disponibles les plus proches. Ils développent aussi des partenariats avec des établissements ouvrant leurs toilettes au public. Un outil indispensable quand on navigue dans la jungle urbaine et qu’une envie pressante se fait sentir !

Le sujet des toilettes en ville peut soulever les foules mais rarement dans des mesures qui font bouger les lignes.

Beaucoup se plaindront des odeurs le long des trottoirs, ou encore de l’impossibilité de localiser une toilette publique à proximité mais ce sont des personnes comme Geerte Piening qui brise le statu quo autour des sanitaires.

Pour ces forces de la nature, madamePee travaille en parallèle à offrir un accès égalitaire aux toilettes dans l’espace public. Contre les pipis sauvages les urinoir•es urbanPee sont prêts à envahir les villes !